La ruée sur les données personnelles

Pour tous ceux qui ne se seraient pas encore aperçus qu’ils sont sujets à l’exploitation de toutes les données enregistrées sur leurs Smartphones, tablettes, et généralement leurs comptes sur les services qui sont liés, voici un des derniers exemples d’exposition incontrôlée de données personnelles.

Socialarks, développeur d’un CRM (« Customer Relashionship Management » ou « Gestion de la relation clients » en langue Française) accessible aux acteurs commerciaux sur l’internet (« Cloud Based » et accessible sur le web comme un service payant) est une entreprise de moins de 100 salariés basée en Chine. Elle vient d’exposer accidentellement pour la deuxième fois les données personnelles de deux millions d’utilisateurs des services des réseaux sociaux FACEBOOK, Instagram et Linkedin. Ces informations étaient en effet disponibles par une simple connexion sur l’adresse du site du CRM (pas nécessaire d’utiliser une identification et un mot de passe). Lire à ce sujet l’article du Figaro ‘Web & Tech’ daté de ce jour. Le business de Socialarks c’est la mise en relation d’entreprises commerciales du web avec des clients qui utilisent l’accès au web (entreprises ou particuliers). Pour alimenter son CRM, Socialarks fait du DATAMINING (collecte de données disponibles sur le web et à travers d’échange avec les sociétés qui font du commerce sur le web). Cette société fait donc office d’intermédiaire entre les vrais commerçants et les consommateurs au travers d’un système de gestion de la relation client. C’est déjà ce que font (mais directement et de façon systématique) GOOGLE ET FACEBOOK au travers de leurs services aux professionnels. Mais alors pourquoi, me direz-vous, d’autres entreprises font elles le même type de mise en relation ?

Simple: parce-que c’est un marché énorme qui aiguise la convoitise des start-up de tous poils. Socialarks est une startup qui a commencé son activité en 2014 (comme marqueur temporel et pour ceux qui suivent ma publication, je rappel que FACEBOOK a racheté Whatsapp la même année). Nous parlons donc et pour résumer de Big Data, Trading platform et Marketing. Et pour parler simplement, de l’exploitation des données personnelles de milliards de consommateurs influençables. Vous et moi, nous faisons partie, et pour la plupart sans le savoir, de ces consommateurs.

Posséder ces énormes bases de données sur l’identité et le comportement de millions de personnes n’est pas seulement utile pour faire du commerce sous influence, mais peut également servir à orienter les choix des citoyens pour des élections ou le comportement de ces mêmes citoyens par rapport à d’autres enjeux. Les fuites de plus en plus fréquentes, la vulnérabilité des bases de données constituées, sans compter le commerce « légal » qui est fait de nos données personnelles devraient nous conduire à réagir, nous les consommateurs.

L’Union Européenne au travers de la directive « GRPD » (en 2016) a fait un premier pas (très timide à mon avis, et parce-que l’UE est avant tout un marché) dans le sens de la protection des données personnelles. Bien, mais c’est d’abord individuellement, par notre comportement, que nous sommes en mesure de lutter contre cette hydre qui utilise les ressources des sciences du comportement humain et de la manipulation à grande échelle.

Pour une information plus complète sur la manipulation de masse, regardez donc le documentaire disponible sur Netflix: « Au travers de nos écrans de fumée » (« The Social Dilemma » dans la langue originale). Pour résumer le sujet en quelques mots, il s’agit d’interviews de personnalités qui ont eu des responsabilités importantes dans des sociétés comme Google, Facebook, Twitter, Pinterest, etc. Tous (ou presque) ont quitté leur fonction en raison de leur désaccord avec le modèle économique de ces sociétés. Et ne vous en faites pas pour eux, ils sont devenus riches (pour la plupart).

En conclusion et vous vous y attendiez, je vous recommande d’adopter une attitude responsable. Ne vous abonnez pas à des réseaux sociaux qui ont un modèle économique déviant (ils ne veulent pas votre bien, ils veulent vous manipuler). Pour faire suite à mon article précédent, je vous recommande également de supprimez votre compte Whatsapp et de remplacez Whatsapp par Signal (une messagerie qui n’a pas encore été rachetée par les commerçants).



Voilà.

Bienvenue chez les nouveaux commerçants

Avec le rachat et l’intégration par les GAFAM de toutes les applications qui peuvent être utiles au recueil des données personnelles nous voici arrivés à un point de non retour. Ce matin, si vous utilisez la messagerie WHATSAPP vous avez reçu un message de la part de FACEBOOK pour vous annoncer les nouvelles conditions d’utilisation de Whatsapp et vous demander de les accepter. Le rachat par Facebook de Whatsapp il y a maintenant 7 ans (pour un montant de 20 milliards de dollars) devait nécessairement mener à une intégration totale de Whatsapp dans le puzzle commercial de Facebook.

Les nouvelles conditions d’utilisation incluent le partage de vos données personnelles avec Facebook. Fort heureusement la directive Européenne (GRPD) limite de-facto les conditions de ce partage pour les citoyens des états Européens. Reste à savoir comment l’Europe peut effectivement vérifier que pour les citoyens de l’UE les conditions de non-partage des données personnelles des utilisateurs de Whatsapp seront respectées par Facebook. J’ose ici faire un parallèle avec l’évasion fiscale et la libre concurrence. En effet que pèsent les amendes infligées par l’UE aux GAFAM par rapport aux monstrueux bénéfices de ces derniers ?

Pour situer l’action en cours, d’abord un petit rappel de l’histoire de Whatsapp.

Whatsapp (forme abrégée de What’s up – « qu’est-ce qui se passe » en Français approximatif ou « quéçadit » en encore plus fleuri). Les noms de ces applications sont décidément des blagues d’informaticiens. L’idée originale des créateurs de Whatsapp était de remplacer la messagerie SMS des téléphones portables par un système de messagerie plus performant passant non plus uniquement par la liaison téléphonique de base mais par internet (une forme de messagerie de type email en plus sympathique). Whatsapp a été développé à partir de 2007 et lancé en 2009 par deux anciens de Yahoo! (vous savez, le fameux moteur de recherche). Succès immédiat et en 2013 Google proposait d’acheter l’application pour 1 milliard de dollars. Les utilisateurs de la messagerie sont devenus un marché qui grossit et les prédateurs se précipitent. En 2014, c’est Facebook qui finalement rachète Whatsapp pour environ 20 milliards de dollars. C’est relativement peu par rapport au marché que représentent les 450 millions d’utilisateurs de la messagerie (en février 2014). Pour Facebook, le marché dont il est question ici, passe par la vente à des commerçants, promoteurs, officines diverses des données collectées par l’ensemble des applications de la firme (Instagram, Whatsapp, Facebook) sur leurs utilisateurs (pas seulement leurs identités et données personnelles, mais aussi leurs profils psychologiques – habitudes de consommation, tendances politiques au travers de leurs choix etc..). En France et d’après une étude IPSOS, actuellement environ 52 % des citoyens utilisent la messagerie pour communiquer avec la famille et les proches. Et tout ça gratuitement. L’application Whatsapp est gratuite, c’est ce qui explique sa popularité. La rentabilité d’une telle plateforme de communication passe par le commerce des données de ces utilisateurs.

SI C’EST GRATUIT VOUS ÊTES LE PRODUIT.

On peut objecter à cela que les messages des utilisateurs de Whatsapp sont cryptés de bout en bout (et réputés inviolables). Le changement des conditions d’utilisation est un premier pas vers l’exploitation étendue des données des utilisateurs. A ce jour, rien n’apparait sur le site de Whatsapp concernant le changement des conditions d’utilisations. (voir en particulier https://www.whatsapp.com/security/). Je suis curieux de suivre dans les mois qui viennent les réactions (ou non-réactions) des instances en charge de la protection des « consommateurs », au niveau de l’UE ou des États Unis.

Pour vous faire une opinion sur l’ampleur de ce qui se passe je vous conseille de regarder l’excellent documentaire intitulé « Derrière nos écrans de fumée » (« The social Dilemma » dans sa langue originale) disponible sur Netflix. Dans ce réquisitoire contre les GAFAM interviennent les anciens dirigeants ou les personnes qui possédaient des postes clés dans les entreprises concernées. Ils ont tous démissionner pour des raisons éthiques. Ce document est bien fait, didactique, sincère et c’est glaçant.

De ces messageries et réseaux sociaux on peut se désabonner et choisir des messageries alternatives respectant la vie privée (voir mes articles précédents).


Voilà